« Je cours sur la plage de chenoua (….) je cours avec la mer qui monte et descend sous les ruines romaines, je cours dans la lumière d’hiver encore chaude, je tombe sur le sable, j’entends la mer qui arrive ….. »( Nina Bouraoui, Garçon manqué )

« J’ai tendu des cordes de clocher à clocher
Des guirlandes de fenêtre à fenêtre
Des chaînes d’or d’étoile à étoile
Et je danse »

Mes pas m’ont amenée sur le rivage, sur l’immensité déserte de cette plage, au crépuscule. J’ai laissé derrière moi un ruban parsemé de lumières éclairant les rues et les maisons, et j’ai noyé mon regard dans les lueurs rosissantes du ciel sans nuages. Mes pieds ont effleuré le sable vierge lissé par le ressac, ils ont ressenti la fraîcheur de l’eau et la douceur des minuscules bulles d’écume.

Je me suis prise pour Vénus émergeant de l’océan, et un élan irrépressible s’est emparé de tout mon être, de la pointe de mes orteils à la racine de mes cheveux.

Et maintenant, je ne suis que mouvement, courbures et contorsions, je m’enivre du vent du large qui fait flotter ma chemise, s’envoler ma chevelure, apporter sur mes lèvres la saveur salée des embruns, et à mes narines la senteur iodée de la mer.

Mes traces sur le sable s’effacent à chaque vague qui s’étale langoureusement, j’avance, je recule, je me penche et n’en finis plus de tournoyer, lancer mes bras vers le ciel ou vers l’élément liquide qui m’appelle et m’attire à lui.

Mais je veux encore profiter de la liberté que j’ai dans l’air tiède de cette fin de journée, jusqu’au vertige, le vertige de l’oubli au contact de l’eau qui vivifie et apaise tout à la fois, le vertige né de la danse, muée en transe, une transe d’où l’on ne revient qu’après avoir épousé l’horizon.
Claudine

 

 

 

 

                     « Le feu est douceur et torture. Il est cuisine et apocalypse… Le feu est beau en soi, n’importe comment. «                     Klein
Carton brûlé sur panneau
250 x 130 cm

 

Immolation

Farce stupide

dernières bulles puantes


La pluie en bruine la nuit ocre

L’ombre en fuite apparaît d’abord,

se redresse aussitôt,

fonce au pas gymnastique,

disparaît définitivement dans la nuit

 

Papa s’était sans doute levé

Maman n’était pas là

Pas de réponse

Papa était parti

 

Affolés les gens se mettaient à courir pieds nus

inutiles mais soucieux devant le feu

Les gens ralentissaient,

s’approchaient,

avouaient c’est beau

c’est tragique

on n’a jamais vu ça

 

Deux voisins venaient de disparaître,

consumés

La nuit redevint parfaite

à peine trouée par la vieille lampe tempête

Les vaches hochaient la tête,

mais ne pipaient mot.

Elisabeth